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Divorce à l’Espagnole


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Non, l’Espagne n’a pas toujours été une mère facile et indulgente pour toutes ses provinces, et le centralisme castillan n’a pas plus ménagé ni respecté les particularités et les particularismes régionaux que ne l’a fait chez nous le jacobinisme français. Le Pays basque et la Catalogne, pour ne retenir que ces deux cas, furent à maintes reprises l’objet de mises au pas d’autant plus rudes qu’ils étaient plus attachés à leurs spécificités, et donc perçus d’en haut comme frondeurs et rebelles. S’il est vrai que qui aime bien châtie bien, il fallait vraiment qu’ils fussent férocement aimés pour être traités comme ils le furent. Mais après tout, n’en a-t-il pas été ainsi partout où l’Etat fut le creuset où se fondirent les autonomies anciennes pour ne former qu’une nation ? En leur temps, la Bretagne aussi renâcla à rejoindre le domaine français des monarques capétiens, la Bavière à entrer dans un ensemble dominé par la Prusse, ou la Sicile à se soumettre à une dynastie piémontaise. L’alliage n’en prit pas moins, où se forgèrent l’unité française, l’unité allemande et l’unité italienne.
Il est vrai qu’au-delà des Pyrénées, les plaies étaient encore saignantes il y a un demi-siècle. Certes, toute l’Espagne, broyée sous le talon de fer du Caudillo, avait été privée par la dictature des libertés les plus élémentaires, mais il faut bien reconnaître que la Catalogne et l’Euzkadi, l’une parce que foncièrement républicaine, voire révolutionnaire, l’autre parce que travaillée par le nationalisme, avaient eu droit à un traitement – un mauvais traitement – spécial. L’aspiration à l’autonomie y apparaissait d’autant plus forte qu’elle avait été plus rudement comprimée et réprimée, et se traduisait en Catalogne par une poussée spectaculaire de l’extrême-gauche, au Pays basque par l’émergence et les sinistres exploits de l’ETA.
On croyait ces temps révolus. Après tant de convulsions et de soubresauts, l’Espagne si longtemps déchirée avait enfin trouvé avec l’avènement de la démocratie le chemin de la paix civile et de la concorde entre les citoyens. Pour ce qui est de la Catalogne, elle avait adopté par 88,7% des suffrages, dès 1979, un statut généreux, encore élargi en 2006, qui lui assurait l’autonomie dans les domaines linguistique, culturel, éducatif, fiscal. Elle était dotée d’un Parlement et d’un gouvernement, la fameuse Generalitat, ressuscitée des morts. Ne restaient à l’Etat central, dépouillé de la plupart de ses prérogatives, que les attributs régaliens, Défense, Affaires étrangères et le dernier mot en matière de justice et de police. Ce n’était plus comme autrefois l’omnipotence de Madrid qui pesait sur les libertés locales mais bel et bien la multiplication des autonomies provinciales - andalouse, galicienne, valencienne, baléare et donc catalane – qui menaçait l’unité nationale. C’est alors même que la Catalogne avait vu enfin satisfaites – au-delà de toutes ses espérances, parfois-même au-delà de toute raison et de toute justice - ses revendications traditionnelles qu’a surgi comme un diable de sa boîte un indépendantisme irresponsable qui met soudain en péril l’idée et le fait national.
Ce prurit indépendantiste, ressurgi des ténèbres ou au moins de la pénombre, travaille simultanément l’Espagne, la Grande-Bretagne, l’Italie, la Belgique, la France. La Catalogne, l’Ecosse, la Lombardo-Vénétie, la Flandre, la Corse, toutes pourtant également dotées d’institutions représentatives propres et largement autonomes, voient s’élever des voix et se lever des forces qui réclament de plus en plus ardemment, au nom du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, celui de se séparer de la nation dont elles sont une partie constitutive. L’Union européenne, dans sa marche tâtonnante et aveugle vers un fédéralisme qui n’a eu de cesse d’affaiblir les Etats-nations et d’encourager sous prétexte de décentralisation un morcellement et un émiettement préalables à leur dislocation, a sa part de responsabilité dans un processus anachronique qui, poussé à son terme, nous ramènerait à un Moyen Age ou un Quattrocento politiques. Sous les apparences trompeuses de la jeunesse et de la liberté, le mouvement qui agite la Catalogne a tout d’une marche arrière, son aboutissement serait une régression. Oui, ce serait une régression qui ferait que l’on ne puisse plus être catalan et espagnol, comme on est breton ou corse et français, milanais ou vénitien et italien, badois ou saxon et allemand.
Le souvenir encore vif d’un passé récent, des ressentiments qui n’ont pourtant plus lieu d’être, des considérations affectives, culturelles, historiques parfaitement respectables, sont le terreau qu’exploitent des politiciens sans envergure qui ne parvenant pas à être les seconds dans Rome rêvent d’être les premiers dans leur village. Ils n’hésitent pas non plus, comme à Anvers, comme à Milan, comme à Edimbourg, à instrumentaliser les égoïsmes les plus mesquins au détriment de la solidarité nationale et sociale. Nous sommes las, ne craignent-ils pas de dire, nous qui sommes riches, de payer pour les régions les plus pauvres… La défunte Mrs. Thatcher a des émules honteux un peu partout. We want our money back. Nous n’en sommes pas encore tout à fait là et nous n’avons pas encore entendu Neuilly regretter que ses impôts profitent à la Creuse.
La scène de ménage qui fait trembler l’Espagne est sur les places publiques. La tragi-comédie en cours va-t-elle déboucher sur la fin de plus de trois cents ans de vie commune ? Il est des divorces négociés à l’amiable, comme celui de la Tchéquie et la Slovaquie. Il en est de sanglants, comme celui qui vit éclater la Yougoslavie et se combattre des peuples qui n’avaient jamais demandé à vivre ensemble. Il est des divorces orageux, comme celui qui pourrait se traduire par la déchirure du pacte qui unissait au moins depuis 1704 la Catalogne et l’Espagne. Qu’il soit d’ordre privé ou public, qu’il concerne un couple ou un peuple, une séparation, une sécession n’est jamais un événement heureux, puisqu’ils ne font que consacrer l’échec. D’un projet de vie commune.
Le pire est-il cependant déjà sûr ? Alors que le gouvernement qui siège et s’agite à Barcelone, s’apprête à proclamer l’indépendance nationale en s’appuyant sur les résultats d’un referendum en tous points contestable, le peuple même au nom duquel il prétend parler sort devant l’imminence du péril. Que le reste de l’Espagne se soulève tardivement contre la partition est une chose. Une autre, et plus décisive, est que pas plus il y a huit jours qu’il y a dix ans, aucune majorité ne s’est jamais dégagée en Catalogne même pour l’indépendance. A en croire les derniers sondages, 60¨% de la population y seraient hostiles. La solution, de toute évidence, n’est pas dans la rue mais dans les urnes et dans une nouvelle consultation, cette fois irréprochable.
Pour conclure, je ne saurais mieux faire que de céder la parole, par-dessus le gouffre de la guerre civile de 1936-1939, au grand écrivain et humaniste Unamuno. Au général Millan Astray, un soudard franquiste qui avait pour macabre devise « Viva la muerte ! » « Vive la mort ! », et ne parlait que de réduire par le fer et le feu la Catalogne et le Pays basque, Unamuno répliqua : « Une Espagne sans Pays basque et sans Catalogne serait comme vous, général, borgne et manchote ! »

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