LE COUP DE PIED DE KAHN
Chronique de Dominique JAMET...
Tout le monde connaît Jean-François Kahn.
Tout Français âgé de sept à plus de soixante-dix-sept ans a eu au moins une fois l’occasion d’écouter et d’apprécier à la radio ou sur le petit écran la parole presque toujours profuse, l’expression parfois confuse et les remarques le plus souvent intelligentes et originales de celui qui, esprit critique mais aussi créateur d’entreprises, a fondé l’hebdomadaire Marianne il y a aujourd’hui près d’un quart de siècle.
Les fidèles lecteurs du magazine et les nombreux lecteurs des innombrables ouvrages de Jean-François Kahn sont bien placés pour constater la rectitude et la continuité de la ligne politique suivie par celui-ci et que marquent notamment le rejet des vieux partis et des clivages périmés, l’attachement à la nation telle que l’ont inventée les pères fondateurs de la Révolution française, à la République telle que l’ont aimée et fait aimer les hussards noirs de la IIIe, à la liberté d’expression, à la liberté de croire, à la démocratie, à la laïcité, enfin le souci permanent d’arracher notre société aux griffes de la technostructure, du grand capital et des superpuissances impérialistes ou multinationales. Natacha Polony défend et illustre désormais cette ligne avec autant de talent que de conviction.
Les uns comme les autres n’en ont été que plus étonnés de découvrir dans l’avant-dernier numéro de Marianne, sous le titre « Heure de vérité » un éditorial de Jean-François Kahn qu’ils n’auraient pas été surpris de lire, sur le site de Médiapart ou dans Le Monde, par exemple sous la signature d’Edwy Plenel ou d’Abel Mestre.
« JFK » s’y attaque avec violence, sans le nommer, à celui qui, dit-il, fut longtemps « le parangon d’une extrême-gauche anarchisante et nietzschéenne » et qui « annonce le lancement d’une publication destinée à fédérer les souverainismes des deux rives (pas les plus démocratiques en l’occurrence ».
Le parangon en question serait-il Michel Onfray ? La « publication » annoncée « Front populaire » ? Sur la base de références historiques incontestables et d’analogies hasardeuses, Jean-François Kahn prédit d’ores et déjà à l’initiative en cours les fatales dérives qui furent celles de Gustave Hervé, socialiste révolutionnaire qui, dès les années 1930, faisait appel à Pétain, de Marcel Déat, socialiste pacifiste converti au fascisme ou de Jacques Doriot, de communiste devenu nazi.
Reprenant le thème déjà orchestré par Abel Mestre, Jean-François Kahn relève « le ralliement, par cohortes entières », des « extrêmes et ultradroites ». Il est de fait qu’Alain de Benoist, Philippe de Villiers et quelques autres, venus de loin, ont manifesté leur intérêt et leur sympathie à la création de Front populaire, comme l’ont fait aussi quelques dizaines de milliers d’abonnés, vénus d’aussi loin mais d’ailleurs et qui sont d’accord pour faire passer leur souci de l’indépendance de la France avant toute autre question. La présence de tel ou tel, désirée, acceptée, ou subie, prête évidemment le flanc au plus facile et au plus classique des amalgames sur le mode « Dis-moi qui t’aime et je te dirai qui tu es ». C’est sur de telles bases que se fondait le genre de réquisitoires, imparables, dont raffolaient Fouquier-Tinville ou Vichinsky.
On peut broder à l’infini sur de tels motifs. Au choix : Léon Daudet a tout fait pour que Marcel Proust obtienne le Goncourt. Donc Marcel Proust était royaliste, homophobe et antisémite. Ou encore : Hitler aimait par-dessus tout sa chienne Blondi. Donc, les bergers allemands sont nazis. On n’attendait pas de Jean-François Kahn qu’il tombe et fasse tomber ses lecteurs dans ce genre de pièges.
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